Sédir: les miracles du Christ

LES MIRACLES DU CHRIST

Les actes du Christ sont tellement grands et nous sommes si peu habitués à les voir dans leur entier, qu’il nous faudrait pour cela avoir des yeux partout et une intelligence universelle. Si nous nous habituons à réaliser ce que nous avons compris du Christ, notre intelligence se développera.

Comment le Christ procédait-Il ?

Il touche le malade, Il le regarde ou ne le regarde pas, Il le guérit à distance ou Il commande à la maladie. Et ici chacun des hommes qui regardent agir le Christ explique Ses guérisons par les notions qu’il croit posséder. Pour le magnétiseur, c’est du magnétisme; pour le spirite, c’est de la médiumnité; pour le magiste, c’est de la magie; pour le volontaire, c’est de la volonté; pour le philosophe, c’est de la légende; pour le disciple seul, c’est la réalité. Le Christ a employé ces procédés non parce qu’Il en avait besoin, mais Il est venu pour rédimer la nature tout entière, pour déposer les germes de Sa Lumière vivante dans toutes les sphères de la vie, de la sensibilité, du sentiment jusque dans ces atmosphères inconnues que notre science se glorifie et s’effraie de découvrir. Quand le Christ emploie le procédé du spirite ou du magnétiseur, c’est pour les purifier et pour rendre moins coupables ceux qui les emploieront après Lui.

Mais il y a dans les miracles du Christ quelque chose qui déconcerte le technicien ou l’adepte: c’est l’instantanéité de ces miracles. Prenez le magnétiseur le plus habile; entre sa main rayonnante et le malade il faut, pour que le fluide passe, du temps et des conditions. A l’adepte le plus élevé qui manie des forces inconnues dont les livres célèbrent l’immensité, il faut aussi du temps. Mais le Christ, Lui, à peine a-t-Il levé la main que le malade est guéri et non seulement ce malade, mais tous ses prolongements invisibles jusqu’au seuil du trône de Dieu, tous les êtres qui tiennent à lui par une fibre physique ou hyperphysique. Cela, c’est la preuve de la surnaturalité des miracles du Christ, c’est la preuve qu’Il est vraiment le Maître, c’est la preuve que la force qu’Il rayonne est vraiment absolue.

Et quand le Christ montre Son pouvoir sur la nature, quand Il calme la tempête, quand Il marche sur la mer, cela a lieu soudain, car ces actes extérieurs ne sont que le prolongement, que l’efflorescence spontanée de Sa vie intérieure. Regardons-nous: chaque fois que nous avons une émotion, l’émotion tend à se manifester au dehors. Et c’est le travail des hommes les plus forts que de tendre à conserver toujours un visage impassible. Cela a lieu pour l’homme, créature infime.

Mais imaginez un être qui soit toute vie, toute vigueur, toute force comme le Christ; vous comprendrez que Sa véritable vie c’est en dedans, c’est Sa vie inconnue et que l’acte qu’Il opère au dehors ne peut pas ne pas avoir lieu, qu’Il exhale le miracle comme le lys exhale son parfum. Le véritable travail du Christ, c’est celui que personne n’a pu voir parce qu’il s’effectuait dans cette caverne mystérieuse où l’homme et le Dieu en Jésus s’unissaient dans l’unité la plus complète et la plus incompréhensible. Autour de nous, les hommes qui ont conduit une enquête sur les forces inconnues de la nature et qui essaient d’en faire profiter les autres ont tous un procédé identique: quand ils voient un malade, ils imaginent une force ou une eau et ensuite ils essaient de verser cette force ou cette eau qu’ils ont créée sur le malade ou sur l’affligé. C’est artificiel.

Regardez le Christ. Il est sur le bord du lac où il y a la tempête. Il voit ses amis désespérés; Son coeur va vers eux et Son corps est emporté par le mouvement de Son coeur. Ceci n’est qu’un côté de l’action du Christ. Son coeur emporte Son corps sur la mer et le rend léger pour aller au secours de Ses amis. Mais ce désarroi chez les apôtres, ce secours qu’Il leur porte, ce sont le prolongement sur la terre d’un drame que le Christ peut-être a vécu peu de temps auparavant dans les espaces irrévélés.

Il y a un monde où la pesanteur, plus spirituelle qu’ici, varie avec l’état psychique des habitants et si le Christ a fait une incursion dans ce monde, Il en a rapporté quelque chose et, en marchant sur la mer, Il a mis sur la terre un peu de la légèreté de cette planète inconnue. Quand Il a multiplié des pains, ne croyez pas qu’Il a tiré des plans ou qu’Il ait exercé sa volonté sur le canevas astral du froment, mais c’est parce qu’Il avait mis quelque chose dans l’essence du froment. Quand Il a séché le figuier ou quand Il a ressuscité des morts, c’est l’efflorescence des luttes qu’Il avait soutenues dans un monde invisible.

Quand le Christ se transfigure, Il n’a pas décrété cela d’avance; Il est monté sur cette montagne parce que Son esprit d’abord avait gravi les montagnes de l’Invisible et Il s’est transfiguré parce que Son corps avait apporté un reflet de cette gloire. Là Moïse et Elie sont venus parce qu’ils étaient les témoins obligés de cette glorification. Et quand le Christ est apparu après Sa mort à Ses disciples, Il n’a pas fait de télépathie; c’est parce qu’Il avait quelque chose à leur dire. Quand Il est monté au Ciel dans son corps, Il ne l’a pas fait comme un yogi qui fait de la lévitation; Il est monté parce que le Père l’appelait, parce qu’Il avait toujours obéi à Sa volonté.

Si nous voulons voir le Christ, sentir Sa présence vivante, il faut que nous le disions, non seulement avec notre bouche, ni même avec l’élan de notre coeur, mais il faut que nous montrions le désir par nos actes. Alors le Christ viendra vers nous.

Ainsi, ce n’est que quand Il a obtenu la permission du Père, Lui, le seul être qui pouvait s’en passer, qu’Il agit; mais aussi avec quelle invincible force, avec une force qui ne connaît aucun obstacle. Il est et Il remplit aussitôt tout l’univers.

Les savants ont vu qu’aucun être ne fait un geste dont l’effet ne se transmette jusqu’aux limites du monde. Cela est vrai plus encore pour le Christ. Vous comprenez que le moindre geste du Christ est encore là, aussi présent que si le Christ venait de l’accomplir, et vous apercevez quelle est la force qu’Il a employée pour semer la vie autour de Lui; vous apercevez pourquoi Il est invincible, victorieux, pourquoi si misérable en apparence, parce qu’Il est Amour, Il guérit parce qu’Il efface la cause du mal. Elle est dans le centre et c’est dans ce centre qu’Il agit. Là Il est et c’est pourquoi Il demande à Ses malades d’avoir au préalable la foi.

Nous voyons que la qualité des miracles du Christ c’est qu’ils sont soudains, c’est qu’ils ne sont pas systématiques, c’est qu’ils sont les aboutissants d’un plan logique.

Ces êtres sont en présence: Lui et un quelconque; et un miracle surgit. Si nous regardons avec simplicité la vie du Christ nous nous émerveillerons devant cette aisance, devant cette grâce dans le merveilleux.

La force d’un travail est dans ce qu’on ne voit pas: ce sont les racines qui font l’arbre fort. Chez tout être il en est ainsi. Quand nous pouvons nous abstraire des soucis quotidiens pour penser au Christ, il est bon alors que nous nous imaginions les soirs, après Son frugal souper, le Christ remontant les pentes de la montagne pour passer solitaire dans Ses réels travaux.

Imaginons ces nuits d’Orient avec les étoiles qui scintillaient plus encore pour reverser leur clarté dans Ses yeux qui la leur avaient donnée. Imaginons le Christ dans ces brises parmi les souffles de la mer faisant comparaître tous les êtres, toutes les créatures auxquels Il voulait donner quelque chose. C’est dans ces colloques silencieux que se sont déroulées les vraies Passions du Christ. Nous ne connaissons pas la vraie Passion du Christ: ce furent toutes ces nuits où toutes les désolations de la Nature, où tous les crimes des hommes, des démons, des créatures pesaient sur Lui et déchiraient Son coeur, tandis qu’Il s’offrait sans cesse à tous les assassins et à tous les empoisonneurs.

Et quand le matin Il redescendit vers les hommes, emportant à travers l’aurore qui se levait les clartés ineffables des aurores éternelles, vous comprenez que le malade qui se présentait, c’était la conclusion naturelle du travail de la nuit. Voilà quel est le mode d’engendrement du miracle vrai.

Dans la vie du Christ tout est coordonné; dans la vie de l’homme tout est dispersé. Notre travail consiste à recréer cette unité. Pour cela, il faut être un avec Dieu; pour cela, il faut adorer un seul Dieu, c’est-à-dire adorer Dieu en soi. Ceux-là seuls adorent un seul Dieu dont toutes les pensées, toutes les aspirations, tous les gestes vont vers Dieu. Les autres sont des idolâtres.

Si nous comprenons la nécessité de cette unité organique, nous voyons que ce lépreux que le Christ guérit, c’est celui-là pour lequel il est le plus indispensable d’être guéri. Tout ce sur quoi le Christ agit, ce sont les représentants terrestres d’une entité invisible universelle et, en agissant sur l’un, Il agissait sur l’autre. Quand nous aurons recréé en nous l’unité, nous agirons de plus en plus loin. Et quand nous aurons achevé notre course, vous verrez avec quelle ardeur nous nous prosternerons pour baiser les traces de Ses pas dans la poussière cosmique.

Pour cela, il faut que nous soyons arrosés par des pluies fécondatrices. Mais pour nous, comme pour la terre, il y a des cultivateurs faux. Vous vous rappelez la parole du Christ: Toute plante que mon Père n’a pas plantée sera déracinée. Il faut confier tous les germes qui sont en nous au vrai jardinier qui attend que nous lui ouvrions la barrière de notre jardin pour y entrer.

SÉDIR